Etude comparée des mandats de dépôt au Mali

                                En droit malien, le mandat, qu’il ne faut pas confondre avec le contrat de mandat, n’est pas, en tant que tel, défini par le code de procédure pénale à l’instar du droit français, source principale d’inspiration du législateur du Mali, en lequel il est affirmé que le “mandat est un acte par lequel un magistrat (ordinairement un juge d’instruction) prescrit que telle personne lui soit amenée ou placée en détention”. Ainsi défini, il ne peut viser qu’une personne déjà tenue pour auteur ou complice des faits.
                              Le juge d’instruction malien peut, selon les cas, décerner mandat d’amener, de dépôt ou d’arrêt (art.114 du C.P.P.). Ce qui nous amène à conclure qu’il dispose de trois sortes de mandats différemment de son homologue français et qu’il a compétence de délivrer le mandat de dépôt, réservé chez ce dernier au juge des libertés et de la détention. Dans ce pays de Jeanne d’Arc, le juge a sous son autorité cinq mandats (5) (art.122 du C.P.P. fr):
                              1-le mandat de recherche;
                              2-le mandat de comparution;
                              3-le mandat d’amener;
                              4-le mandat d’arrêt;
                              5-le mandat de dépôt.
                             On constate que le mandat de perquisition, qui existe au Canada et aux Etats-Unis, n’est pas connu en France, encore moins au Mali.
                             Le mandat écrit est individuel et doit être validé par son auteur qui a obligation de s’identifier et de le signer avec son sceau. Il doit comporter des mentions essentielles dont l’identité complète de celui contre lequel il est délivré. Il est incommunicable, c’est-à-dire qu’il n’est pas délégable.
                             Les mandats sont exécutoires sur toute l’étendue du territoire de la République du Mali entre 6 heures et 18 heures, sauf autorisation expresse du procureur de la République, par l’entremise des agents de la force publique, et peuvent, en cas d’urgence, être diffusés par tous moyens, notamment le mandat d’amener et le mandat d’arrêt.
                           Il importe de savoir qu’en cas de fuite à l’extérieur de la personne inculpée, le juge est amené à lancer le mandat d’arrêt international, dont l’exécution peut dépendre, malheureusement, de la volonté de collaboration du pays mandataire. Le plus souvent, selon l’importance, soit politique ou économique, de l’Etat mandant, les mandats sont plus ou moins exécutés avec rapidité.
                            A la suite de l’exécution du mandat d’amener et du mandat d’arrêt, le juge est tenu de procéder à l’interrogatoire de la personne respectivement dans les 24 heures et 48 heures. Au-delà de ces délais, l’auteur devient coupable de détention arbitraire prévu et puni par l’article 76 du CP.
                             Le mandat d’amener n’est pas un titre de détention, sauf à être confirmé. Le mandat d’arrêt,  quant à lui, il se suffit à lui-même pour remplir le rôle du mandat de dépôt, si le juge le maintien après interrogatoire.
                           Selon l’article 123, “en matière correctionnelle, si la sanction encourue comporte une peine d’emprisonnement la détention provisoire peut être ordonnée :
                          -lorsque la détention provisoire de l’inculpé est l’unique moyen de conserver les preuves ou les indices matériels ou d’empêcher soit une pression sur les témoins, soit une concertation frauduleuse entre inculpés et complices ;
                         – lorsque cette détention est nécessaire pour préserver l’ordre public du trouble causé par l’infraction ou pour protéger l’inculpé, pour mettre fin à l’infraction, pour prévenir son renouvellement ou pour garantir le maintien de l’inculpé à la disposition de la justice ;
                        -lorsque l’inculpé se soustrait volontairement aux obligations du contrôle judiciaire. Voilà les conditions dans lesquelles le juge a la possibilité de décerner un mandat privatif de liberté. C’est pourquoi, pour pousser à la limite du pouvoir redoutable du juge d’instruction, l’article 124 C.P.P. associé à l’article 127 du même code lui impose, le cas échéant, de prendre une ordonnance spécialement motivée dont la durée est de six mois renouvelable une fois, dans le cas précis où la peine encourue est supérieure à deux ans (art.127). Si elle n’atteint pas deux ans, l’inculpé régulièrement domicilié au Mali ne peut être détenu plus d’un mois après sa première comparution.(art 125 du C.P.P.).  Mais ces dispositions de l’article 125  ne s’appliquent ni aux inculpés déjà condamnés pour crime, ni à ceux déjà condamnés à un emprisonnement de plus de trois mois sans sursis pour délit de droit commun. En matière criminelle, le juge n’étant pas obligé de motiver son mandat (art.134 C.P.P.) doit faire en sorte que sa durée n’excède pas un an, mais en cas de nécessite, limiter la détention de l’inculpé à trois ans, à la suite de son renouvellement motivé et répétitif intervenant, à chaque fois, huit jours précédents son expiration.
                        On retiendra que l’avis du procureur de la République est requis à la délivrance du mandat d’arrêt et à la levée de tous les mandats, même d’office, à l’exception du cas du juge de paix en matière correctionnelle ou de simple police.
                        En dehors du juge d’instruction, comme en France :
                       . le procureur de la République,” en cas de délit flagrant, lorsque le fait est puni d’une peine d’emprisonnement, et si le juge d’instruction n’est pas saisi,, même à la suite d’un mandat d’amener, placer le prévenu sous mandat de dépôt, après l’avoir interrogé sur son identité et sur les faits qui lui sont reprochés”. Il en sera de même à la suite d’enquête préliminaire, en vertu du principe de l’opportunité de poursuite. (art 83 C.P.P.) Ce prévenu doit comparaître au bout de trois mois , à défaut de quoi, il peut être mis en liberté.
                      . le tribunal correctionnel peut, si le fait est passible d’une peine criminelle, décerner de suite un mandat de dépôt ou un mandat d’arrêt et renvoyer le ministère public à mieux se pourvoir. Mais si le délit est de droit commun et si la peine prononcée est au moins d’une année d’emprisonnement, le tribunal peut, par décision spéciale et motivée, décerner mandat de dépôt ou d’arrêt contre le prévenu (art. 435 et suivant C.P.P?). IL n’a pas reçu, dans le cadre du Mali, contrairement à la France, le pouvoir de décerner un mandat d’amener. L’effet de ce mandat de dépôt subsiste à la réduction de la peine par la cour, qui peut autrement ordonner la main levée, ce qui est exclu en cas de pourvoi.
                    .le président de la cour d’assises, en vertu de son pouvoir discrétionnaire, peut au cours des débats appeler, au besoin par mandat d’amener, et entendre toutes personnes ou se faire apporter toutes nouvelles pièces qui lui paraissent, d’après les développements donnés à l’audience, utile à la manifestation de la vérité (art.299 C.P.P.). Il s’agit de témoins entendus à titre de simples renseignements.
                      La loi sur l’organisation judiciaire ne prévoit encore le juge de l’application des peines dont la place est prépondérante en France et qui a faculté, à ce titre, de décerner mandat d’amener, en cas de besoin aussi.
                      .le président de la chambre d’accusation  ou le conseiller qu’il a désigné peut décerner mandat d’amener et mandat d’arrêt, en cas de nécessité. (art.199 et 205 C.P.P.).
                     Dans un intervalle d’âge de 13 ans à 18 ans,  le juge des enfants peut s’assurer de la suivie de l’enfant mineur, en prenant des mesures de garde provisoire.
                     La cour qui se déclare incompétente en raison de la nature criminelle des faits poursuivis, peut également, le ministère public entendu, décerner mandat de dépôt ou d’arrêt contre le prévenu (art. 502 CP.P.).
                   En cas d’arrestation provoquée par un mandat d’arrêt, l’accord de la personne n’est pas requis. Mais dans le cas où elle intervient alors que le dossier est déjà réglé, le mandat d’arrêt conserve toujours sa force exécutoire. La recherche d’une personne au moyen d’un mandat de dépôt, qui peut aussi servir au transfèrement,  suppose qu’elle est en évasion.
                    En cas de trouble à l’ordre public, le président du tribunal peut décerner mandat de dépôt contre le fauteur qui refuse de se plier à l’ordre malgré le rappel qui lui est fait.
                  Les irrégularités des mandats sont sanctionnées contre :
                . le greffier qui doit s’assurer que les mandats comportent les mentions obligatoires exigées par la loi, c’est-à-dire de savoir s’ils sont régulièrement signés, datés et revêtus du sceau du magistrat ou s’ils mentionnent l’identité de la personne et, pour ceux qui l’exigent, qu’ils mentionnent aussi la nature des faits imputés et de leur qualification juridique ainsi que les textes applicables.
               . les magistrats qui ont toléré des détentions arbitraires, conformément à leur statut.
                Des irrégularités peuvent intervenir lors de la délivrance des actes ou lors de leur signification ou notification. Seules les premières sont prises en compte, alors que  quant à celles liées aux significations, notification et à leur exécution, elles entraînent nullité de l’exécution ou de la caducité des mandats.
               La jurisprudence française considère que les irrégularités commises ne doivent entraîner de nullité que si celles-ci sont substantielles et de nature à porter atteinte au droit de la défense. Ce qui laisse au juge l’appréciation souveraine de déterminer quelles sont celles qui demeurent substantielles ou violent les droits de la défense.
              Enfin, je n’ai pas l’ambition d’épuiser totalement le sujet qui est assez large, mais de vous donner les points importants exclusifs aux mandats, en espérant que vous en tirerez un bénéfice.
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