Aujourd’hui, au Mali, il existe trois (3) pouvoirs : le pouvoir exécutif, le pouvoir législatif et le pouvoir judiciaire.
L’article 81 de la constitution malienne, bien entendu, dispose : « Le pouvoir judiciaire est indépendant des pouvoirs exécutif et législatif. Il s’exerce par la Cour Suprême et des autres Cours et Tribunaux. » L’apothéose se retrouve dans l’article 82 de cette même loi suprême : « Les Magistrats ne sont soumis dans l’exercice de leur fonction qu’à l’autorité de la loi. » Et, en plus, ils ne peuvent être révoqués qu’après décision du conseil supérieur de la magistrature (art.3 al.3 du statut de la magistrature). Dans l’exercice de leur fonction, le même statut, en son art.4, leur assure toute la protection nécessaire contre les menaces et attaques de quelle que nature que ce soit dont ils peuvent faire l’objet. Ces textes sont bien beaux, mais est-ce la réalité du vécu, selon que l’on se place du côté du pouvoir politique, des Magistrats, eux-mêmes, et de la population ou du peuple au nom duquel la justice est rendue ?
I-DU COTE DU POUVOIR POLITIQUE :
Dans le contexte du Mali, le pouvoir politique limite énormément les pouvoirs du Juge, par le fait des lois ou des pratiques avec l’environnement immédiat:
A-Limite des pouvoirs du Juge par les lois :
a- Le recrutement du juge :
Selon les articles 37 et 38 du statut de la Magistrature, le pouvoir de recrutement des Juges revient au Ministre de la Justice. Pour qui connaît comment ce recrutement est opéré, il n’est pas exempt de reproche, à bien des égards, à cause de certaines pesanteurs qui peuvent résulter de pressions hiérarchiques, sociales, ou financières :
1-Pressions hiérarchiques pour le recrutement des magistrats :
Ce genre de pressions trouve un terreau fertile le plus souvent quand le premier responsable du Ministère de la justice manque de caractère et est facilement influençable, si bien qu’il se laisse imposer des candidats qui, une fois recrutés, causent du tort à l’indépendance de la Justice. Ces derniers, en effet, par devoir de reconnaissance, restent maniables par ceux-là dont leur réussite dépend.
Il a été dit qu’au temps d’un Ministre du Mali, chaque institution proposait la liste de candidats dont elle souhaitait le recrutement. Sur la liste de chacune d’elle le recrutement se faisait, en plus de celle du Ministre lui-même. C’est alors seulement que le reste des places disponibles est comblé par les candidats les plus offrants.
2- Pressions sociales pour le recrutement des magistrats :
Rien ne vient démentir l’idée que des magistrats sont recrutés grâce au statut social de leurs parents qui gardent en mains un privilège sur eux. Ces parents de notoriété incontestable savent remuer le cocotier quand il faut pour faire admettre dans la magistrature de gens qui ne peuvent pas y accéder en pure légalité.
3-Pressions financières au recrutement des magistrats :
Comme il est souligné tantôt, ce fut un temps où seuls ceux qui pouvaient y mettre le prix, financièrement parlant, accédaient avec facilité au corps des magistrats. Ainsi, des Ministres, pour éviter des fraudes de ceux qui ont accepté d’être soudoyés, ont fait corriger des copies des candidats aux concours de recrutement de magistrats et proclamer leur résultat dans leur bureau. Et paradoxalement, ces Ministres, pour avoir bien fait, ont été traités de tous les noms.
Il est établi que ce type de magistrats est prêt à tout pour se faire les poches quitte à ruiner leur indépendance.
b-La nomination du Juge :
1-La Direction Nationale de l’Administration de la Justice et le Ministère de la Justice :
Dans l’ordre normal des attributions, le projet de mutation et de nomination des Magistrats incombe à la Direction Nationale de l’Administration de la Justice, qui n’est pas toujours du sang bleu dans ses choix. Il est de pratique qu’une fois ce projet préparé sur demande du Ministre de la Justice, il est présenté à celui-ci auquel il est loisible de le soumettre à l’appréciation des différentes Directions assujetties à son Département, ou de le peaufiner en y associant son Cabinet et le Secrétaire Général. Ensuite, ce projet est adressé au Président de la République qui le soumet, la plupart, à la Cellule du Conseil Supérieur installée au niveau de la Présidence. Après le travail de cette Cellule, il est retourné au Président de la République, avec des propositions d’amendements ou non. Ce Premier Magistrat peut le retourner au Ministre de la Justice ou faire venir ce dernier à son bureau pour arrêter sa forme finale. En tout cas, il ne passe pas tant que les violons ne s’accordent pas.
A ce niveau, évidement, ceux qui ont des entrées essayent par tous les moyens de torpiller les nominations déjà proposées. Certains, d’influence avérée auprès du Chef de l’Etat ou de ses collaborateurs y parviennent, dit-on.
2-Le Conseil supérieur de la magistrature :
En mettant à part la nomination des auditeurs de justice (art.45 du statut de la magistrature), qui sent à des kilomètres le favoritisme, l’on est obligé de reconnaître que le conseil supérieur de la magistrature est une farce, tant elle sait être injuste de bien de fois, or il a été institué pour garantir l’indépendance des Magistrats.
L’inamovibilité du juge tel que prévue dans le texte n’a de sens que lorsque la nécessité selon la tête du magistrat a pion sur rue. Tout autant, le plan de carrière de ce dernier n’est fait cas que pour arranger quelqu’un.
Personne ne s’en offusque de l’injustice de nommer des magistrats de grade exceptionnel à des postes inférieurs à ceux de premier grade. Certains, pour peu ou à défaut de soutien, sont envoyés très loin alors que d’autres à couteaux plus tranchants et criminels mais soutenus, se passent les postes à Bamako.
Le Conseil Supérieur qui porte en lui des membres non Magistrats se divise pendant ses réunions en clans qui défendent chacun ses protégés, notamment ceux du corps qui luttent pour leur maintien, ou pour leur promotion ou celle de leurs amis, au détriment de l’ensemble et de l’indépendance de la justice. Ces derniers temps, l’on constate la tenue de concertations en amont du conseil à l’effet d’harmoniser les positions afin d’influencer les nominations, toujours au détriment de ceux dont les voix ne sont pas portées devant cette importante réunion parce que décidant de la carrière et de l’avenir des hommes.
De plus en plus des voix s’élèvent pour demander que le Conseil Supérieur soit présidé par le Premier Président de la Cour Suprême, à l’instar de ce qui se passe au Bénin, et qu’il soit composé uniquement de Magistrats, pour mieux garantir son indépendance et mettre fin, du coup, à toutes ces tractations qui se trament et président à sa négation.
Pourquoi pas, le mali est dans l’échelon des Etats qui peuvent organiser des élections afin de pourvoir aux postes les plus importants dans la Magistrature.
c-La rémunération du Juge :
L’article 60 du statut de la Magistrature et bien d’autres textes ont permis de déterminer le traitement des magistrats en termes de rémunération. A ce niveau, on regrettera le fait que la conception du budget de la Justice exclue les principaux concernés et présente deux paliers, même si globalement la Justice est un pouvoir, soit en se plaçant par rapport à l’Exécutif et à l’Assemblée Nationale, soit par rapport à son ordonnateur, soit par rapport à la Cour Suprême :
1-Par rapport à l’Exécutif et à l’Assemblée Nationale :
C’est une vérité incontestable que le budget du Ministère de la Justice s’opère en dehors des Magistrats et concerne tous les agents qui émargent au nom de ce Département, et est voté tel que présenté par l’Exécutif, alors que ce sont les deux autres pouvoirs qui préparent et présentent leur budget. Il n’est pas rare que les citoyens soient mis devant le fait accompli de la part des Députés qui se donnent parfois le droit de voter des lois pour revaloriser leur traitement, ou de celui du Président de la République et des Ministres et des autres institutions.
2-Par rapport à l’Ordonnateur du budget des Magistrats :
Est-il besoin de répéter que l’ordonnateur du budget de la Justice demeure le Ministre de la Justice qui dispose de tout l’arsenal financier pour l’assister ? Le fonctionnement normal des Cours, excepté la Cour Suprême qui a son gestionnaire propre, dépend de lui. C’est ainsi que l’organisation des Assises reste suspendue à sa disponibilité financière. Qui connaît la ténuité du budget dont il dispose, sa tâche est la moins aisée et lui demande beaucoup de gymnastique. L’intolérable est d’accepter que les Magistrats ne peuvent rien entreprendre sur le plan financier sans son aval qui le met très souvent dans des conditions inconfortables.
3-Par rapport à la Cour Suprême :
Alors qu’il est consacré à l’article 81 de la Constitution que le pouvoir judiciaire s’exerce par la Cour Suprême et les autres Cours et Tribunaux, on note une discrimination de traitement entre les membres de cette Cour et le reste de la Magistrature. Seule elle est reconnue comme institution de la République laissant en pétaudière l’entier de son corps.
La Cour Suprême, désormais institution au même titre que les autres institutions, nargue au plan traitement les autres membres du pouvoir judiciaire, comme si une institution est supérieure à un pouvoir. Elle est dotée d’un service de gestion qui se charge de la conception de son budget et d’un ordonnateur propre qui est le Premier Président de la Cour.
Les membres de la Cour Suprême, qui sont nommés principalement sur proposition de son Premier Président, sont nettement mieux payés que les autres Magistrats de grade exceptionnel affectés à d’autres juridictions, et qui n’ont pas eu la chance d’y être nommés, si bien qu’à la retraite ils n’ont pas les mêmes droits. Ceci est de nature à amener des frustrations.
Enfin, quel sens pratique donne-t-on à cette disposition qui veut faire de la Justice l’égale du pouvoir exécutif et du pouvoir législatif ?
L’indépendance du Juge donc ne peut être effective tant que pour rendre justice il dépend de l’efficacité de son environnement.
B-Limites des pouvoirs du Juge par les pratiques avec l’environnement immédiat :
Personne ne dénie le fait que les subalternes, les professions libérales, la police judiciaire, les experts et les services de la sécurité contribuent à l’effort et à l’œuvre de Justice, mais peuvent aussi poser des freins à son épanouissement et à son indépendance:
a-Limitation des pouvoirs du Juge due aux subalternes :
Le fait que les agents subalternes de la Justice soient recrutés et mutés par l’exécutif sans tenir compte de la volonté du juge est de nature à amenuiser le pouvoir de celui-ci. Il arrive que le juge soit confronté au refus de mutation ou de maintien d’un agent qui paralyse le service ou qui donne satisfaction. Un Juge n’est pas indépendant quand pour rendre justice il lui faut faire appel à la volonté d’autres services que le tien. Cela peut se produire dans le cas où dans la juridiction il y a une insuffisance de personnel, ou si ce personnel n’existe même pas.
b-Limite des pouvoirs du juge due aux professions libérales :
Il est indéniable que le service de la Justice a besoin, pour sa crédibilité, de compétences extérieures comme les Avocats, les Notaires ou les huissiers-Commissaires Priseurs. Toutes ces différentes corporations ont leur place dont la finalité est d’aboutir à une justice saine, sereine et juste. Mais leur mauvais service peut ternir l’indépendance du Juge. Rien que des actes mal servis ont le tort de nuire aux droits des justiciables. Il importe que ces acteurs dont l’univers, comme les Magistrats, est essentiellement dans la justice, jouent pleinement leur rôle pour éviter au Juge des critiques infondées.
c-Limitation des pouvoirs du juge due à la police judiciaire :
Dans la chaîne pénale, la place de la police judiciaire est prépondérante. Sans elle, le Juge pénal ne peut rien.
Mais son problème n’est autre que les deux casquettes qu’elle porte en même temps, et sa situation disciplinaire.
Au mali, la police administrative et la police judiciaire sont presque confondues. Elle relève pratiquement du même échelon, soit qu’elle soit à l’Escadron ou dans une Brigade, dans une Direction ou dans un Commissariat. Il n’existe pas à présent une police judiciaire propre au Ministère de la justice aux ordres du seul elle doit répondre. Quelle indépendance veut-on reconnaître à un Juge dont l’ordre peut être contredit ou contrarié par l’ordre du supérieur hiérarchique de l’Officier autre que lui, qui note ce dernier, en plus? Cet officier, s’il a la bénédiction de ses Chefs hiérarchiques au nombre desquels le Juge compte peu, il peut laisser ce dernier pantois en refusant d’exécuter son ordre. On a assisté à des cas qui n’ont été suivis d’aucune sanction de l’agent réfractaire, et cela malgré l’insistance de l’ordonnateur. Donc, sans occulter l’effort inlassable que mène la police judiciaire, il convient de lui donner plus de poids et d’indépendance en réunissant son pouvoir de direction à la seule structure de la Justice.
e-Limitation des pouvoirs du Juge due aux experts :
A cause de la technicité de certaines affaires, le Juge est obligé de faire appel aux compétences des experts qui peuvent éclairer sa lanterne. En raison du nombre réduit des experts et de la difficulté que ceux-ci rencontrent pour rentrer dans leurs droits vis-à-vis de l’Etat, empiètent sur l’efficacité du Juge dont l’autorité peut être bafouée, entrainant parfois des suspicions sur son indépendance. Encore que les textes admettent à l’expert de décliner son expertise, au grand dam du Juge.
F- Limitation des pouvoirs du Juge due à l’insécurité :
Il n’est plus un secret que l’insécurité limite le service de la Justice dans les zones où elle existe. Il est à l’évidence que bon nombre de parties du mali, où le juge ne peut plus officier, sont laissées dans les mains hétéroclites de terroristes.
En outre, le juge, dans l’exercice de ses fonctions, ne bénéficie pas de la sécurité indispensable à sa protection, exposant sa vie de sorte que son indépendance reste aléatoire. C’est parfois la croix et la bannière pour obtenir le service de sécurité d’une audience. Récemment, l’une des revendications de la grève des Magistrats a trait au problème de sécurité de ceux-ci.
En effet, la sérénité du juge dépend aussi de l’assurance de sa sécurité, si, surtout, la jalousie de son indépendance peut déterminer de mauvaises volontés à vouloir son agression.
II- DU COTE DES MAGISTRATS EUX-MEMES :
Dans l’exercice de leurs fonctions, les Magistrats peuvent être amenés à résister à certaines tentations ou contraintes.
A-RESISTANCE DU MAGISTRAT CONTRE LES TENTATIONS :
Baromètre de la société, le Magistrat constitue le dernier rempart contre toutes les dérives à quel que niveau qu’elles soient. Grâce à lui, la loi s’applique à tous, même contre l’Etat, qui devient ainsi sujet de droit. N’étant pas dans les secrets de Dieu, il joue néanmoins un semblant de son rôle sur terre.
Pour cela, il doit être à l’abri du besoin pour s’éviter la tentation de la corruption. Il n’y a pas d’indépendance quand, à l’effet de rendre la monnaie à des justiciables, le Magistrat est contraint de sortir par la fenêtre opposée à la clameur publique. C’est pratiquement difficile, mais une vraie justice commande l’application stricto sensu de la loi à l’égard de tous. La stabilité d’un Pays en dépend. Il n’est pas exagéré de dire qu’il n’y a et il n’y en aura jamais de paix sans une justice équitable.
Donc, la corruption du Magistrat joue négativement sur son indépendance. C’est pourquoi, il doit s’opposer à ses faveurs et la combattre par tous les moyens de droit.
B-RESISTANCE DU MAGISTRAT CONTRE LES CONTRAINTES :
Même si c’est vrai que son recrutement, sa nomination et sa rémunération dépendent, en grande partie, de structures autres que purement judiciaires, le Magistrat doit pouvoir avoir la force nécessaire de s’opposer à toutes demandes venant d’elles qui entrent en conflit avec la loi. Même si c’est pour obtenir des promotions, le Magistrat ne doit courber l’échine que devant la loi. Il ne doit nullement s’acoquiner avec des violeurs de l’ordre qui n’hésiteront pas un instant à le jeter à la pâture après l’avoir pressé à souhait.
Tout autant, il fera œuvre honorable en s’insurgeant contre les pressions qui ont tendance à le décider sur la mauvaise voie de ces jugements, notamment celles des parents et amis. Le magistrat peut être de tout ce qui reste à la société lorsque les dérives s’amplifient et prennent le pas sur le tolérable. Les gens pensent que devant lui l’impunité ne peut pas prospérer.
III-LE PEUPLE AU NOM DUQUEL LA JUSTICE EST RENDUE :
Ne dit-on pas que la Justice est rendue au nom du peuple ? Si cela est vrai, elle doit gagner la compréhension de tous. Mais, malheureusement, l’ignorance ou le défaut de probité de ses bénéficiaires peut parfois travestir sa finalité.
A-L’ignorance des bénéficiaires de la justice :
L’on ne peut pas nier que les 80% des bénéficiaires de la Justice au Mali sont analphabètes en considération de la langue dans laquelle les textes de loi sont écrits. A cause de cette ignorance, très souvent l’incompréhension naît entre acteurs de la Justice et les justiciables. Il arrive que ces derniers perdent des procès par cette ignorance. L’aveugle qui refuse aussi de se faire guider court inexorablement à sa perte. Il est nécessaire donc que ceux au nom desquels le législateur a consacré la protection des droits cherchent à connaître les lois de la République, les procédures de leur mise en œuvre afin d’éviter d’être surpris par des décisions qu’ils ne comprennent pas.
Il va de soi que quelqu’un qui ignore mêmes les voies de recours mises à sa disposition pour attaquer une décision de justice peut être exposé à la perte de son procès, alors qu’il aurait pu le gagner s’il les connaissait. Rien n’est plus désolant pour quelqu’un qui s’entend dire qu’il est forclos parce qu’il n’a pas su exercer les voies de recours dans un délai imparti, ou seulement n’a pas payé la consignation nécessaire à la prise en charge de sa demande.
Il résulte, certes, de ces méprises dues à la méconnaissance des textes la spoliation d’argent et, par conséquent, des récriminations contre le juge qui ne se reproche, cependant, rien, parce que l’intéressé s’est fait arnaquer par quelqu’un qui n’a aucune autorité sur la justice. A cause de cette ignorance beaucoup pensent qu’actuellement tout procès gagné est un fruit de la corruption, même si tel n’est pas le cas toujours, et n’hésitent pas à mettre en cause l’indépendance de la Magistrature, en répandant des invectives.
On ne fermera pas, outre mesure, sciemment les yeux sur le comportement de certains acteurs de la justice qui profitent de cette ignorance pour soutirer indument de l’argent aux justiciables les moins avisés.
B- Le défaut de probité des bénéficiaires de la Justice :
Rares sont actuellement ceux qui viennent à la Justice sans en avoir une idée derrière la tête, mêmes ceux qui tiennent le bon bout de leurs affaires. A qui mieux mieux, chacun essaye comme il peut de mener le juge en bateau. Pour certains, la corruption est la règle. Souvent, elle prospère, mettant la corde au coup du juge qui perd, par ce biais, son indépendance.
La probité du justiciable l’empêche d’accéder à toutes compromissions en vue de faire triompher ses droits. Autrement, il s’abstient d’insister à gagner un droit qu’il sait pertinemment injuste.
Une société en grande majorité probe aide beaucoup le juge à préserver son indépendance, sinon, le contraire, l’entraînera au gré d’un ballotage de ceux-là qui excellent dans la délation.
L’indépendance effective et souhaitable de la Justice, donc du Juge, révèle de nombreuses exigences qui ont du mal à être satisfaites, que cependant il est nécessaire de satisfaire, si nous la voulons crédible, transparente, impartiale, équitable, et, alors, honorable. Aucune démocratie n’est viable sans Etat de droit, et il n’existe pas d’Etat de droit sans une Justice indépendante et juste.
Il faut, enfin, combattre l’état de fait décrié un jour d’une rentrée judiciaire par l’ex-Bâtonnière Me Fanta Sylla : « Le Magistrat malien est indépendant de tout sauf de l’argent sale. » Il y a lieu d’ajouter aussi, de la promesse de promotion.
Les interférences extérieures à la Justice et les mises de bâtons dans ses roues, et le défaut de punition contre ses fauteurs de trouble ne contribuent nullement à raffermir son indépendance.
Il est difficile de clore ces écritures en omettant de saluer les actions qui sont en train d’être menées depuis l’arrivée du Ministre Malick Coulibaly et de certains collaborateurs en vue de l’affirmation sans conteste de l’indépendance de la Justice.
Il reste à se convaincre que la nomination de l’ex-Ségal du Ministère de la Culture, Andagoli Guindo, rentre dans ce cadre. Celui-ci est connu pour ses compétences et son honnêteté.