Une année finit et une autre commence. C’est dans ce cas qu’il est de bon ton de regarder dans le rétroviseur, de procéder à un examen de conscience pour une remise en cause de ceux qui ont eu l’insigne honneur ou la lourde charge de nous gouverner dans les actions qui n’ont pas été couronnées de bonheur à l’égard de la population, ou pour mériter de la gratitude de la Nation dans la bonne conduite des affaires du Pays.
Pour être objectif, voire pragmatique, le transfert du pouvoir en 2013 ne s’est pas opéré sur un plateau d’or, à la suite, cela ne peut pas tomber si tôt dans l’oubli, d’une crise sécuritaire et institutionnelle de laquelle le Président de l’époque, Amadou Toumani Touré dit ATT, fut victime d’un coup d’Etat à deux mois de la fin de son deuxième mandat, qui l’a contraint à l’exil de sept (7) ans au Sénégal. Celui-ci vient de rejoindre le bercail à la joie de tous ceux qui ont été mécontents de son renversement injuste du pouvoir. En effet, il est difficile de nier qu’il a fait du mieux qu’il a pu pour son Pays. Mais aucune œuvre humaine ne peut être parfaite. Quelle que soit toute la bonne volonté d’un homme, il peut commettre des erreurs d’appréciation à certains endroits de son règne, surtout quand il se trouve en face d’individus captieux qui oeuvrent uniquement pour leurs intérêts. Il faut reconnaître qu’il a été desservi vers la fin de son pouvoir. Mais bon nombre de Maliens croient comme fer que n’eut été le coup d’Etat qu’ils qualifient de plus débile que l’histoire du monde a enregistré, le Mali ne tomberait pas dans le trou abyssal dans lequel il se trouve actuellement, parce qu’autrement les djihadistes n’auraient pas la possibilité d’occuper tout le nord aussi rapidement. En effet, depuis lors le Mali se porte au plus mal que l’ensemble des Maliens cherchent inlassablement à soigner. C’est ainsi, effectivement, que celui-ci fut amené, couteau à la gorge, à signer un accord dit d’Alger pour la paix et la réconciliation qui marque la transcendance de la position de quelques enturbannés qui avaient pris des armes contre leur pays en s’associant avec toutes sortes de malfaiteurs. On ne le dira jamais assez.
C’est ainsi que nous comprenons les multiples difficultés qui ont assailli toute l’année 2019, qui demeurent une suite logique de la situation qui a prévalu comme sommairement rappelé au début de notre intervention
SUR LE PLAN PAIX, SECURITE ET COHESION SOCIALE :
Durant cette année 2019, les Maliens n’ont pas cessé de garder espoir à voir définitivement la crise derrière eux. Mais le constat vient nous prouver que cet espoir se réalise dans la douleur à cause de manque de franchise des parties à la résolution du conflit, qui s’en rejettent la responsabilité. Ce qui est constant, en dehors des groupes armés connus à l’origine qui se rejoignent parfois et se séparent dans leur réalité d’approche, d’autres groupes se sont formés et ont imposé leur prise en charge, contre la volonté de la CMA qui a fait le caractériel pendant quelques semaines avant de revenir à la raison. Cela fut le cas quant le Gouvernement a annulé sa participation à une réunion qui s’est tenue à Kidal. L’on ne peut compter le nombre de fois où elle a suspendu pour peu de chose sa participation au Comité de Suivi de l’Accord (CSA) La singularité de celle-ci à la phase du MOC et du cantonnement a fini de déterminer les Maliens sur la mauvaise foi des Chefs de cette organisation armée, tant elle a dansé et continue de danser sur ses deux pieds toujours opposés. Est-ce que cette attitude est comprise ? Cela signifie que dans ce groupe minoritaire, en fait, au Nord, il arrive que quand certains regardent la pointe de leurs pieds, d’autres regardent plutôt du côté du ciel où se trouvent des experts de tout, parmi lesquels on retrouve quelques responsables qui ont élu domicile en France et qui leur tirent le vers du nez jusqu’au sang, de sorte qu’avant qu’ils accordent leur violon le Mali peut attendre. Ce sont ces derniers qui procurent à la branche armée les armes sophistiquées, de dernier cri, qui sont même parfois interceptées par les services d’ordre. Ceux-ci ne veulent pas entendre que l’armée malienne a fait son retour à Kidal, ce qui justifie leur attitude quant à la constitution des forces armées reconstituées. Ils tiennent à cette disposition de l’accord comme à la prunelle de leurs yeux, car ils nourrissent dans le secret de leur cœur la chance d’avoir, par cette manière, la lueur de la possibilité de l’atteinte de leurs objectifs. Est-il sensé d’accorder la direction et les 80% des effectifs des forces armées reconstituées à des irrédentistes pour sécuriser une partie du territoire qu’ils revendiquent ? Et en vertu de quelle fin leur donnera-t-on les 30% du budget national ? Ce qui constitue une difficulté majeure à la mise en œuvre de l’accord. De plus en plus, on se rend compte que de telles concessions qui peuvent conduire à la partition du Mali sont injustes pour le reste du peuple malien. On pense même que cela est arrivé parce que cet accord n’a pas été discuté au parlement afin que tout le monde s’en approprie. D’ailleurs l’accord manque de lisibilité dans sa totalité.
Le seul fait positif de l’accord depuis sa signature, si l’on peut le croire ainsi, c’est l’impression qu’on a que les armes se sont tues apparemment entre l’armée malienne et les séparatistes, et que ceux-ci se sont résolus, du bout des lèvres, à reconnaître l’intégralité territoriale du Pays, sans oublier cependant les affrontements récurrents entre groupes armés et la célébration de l’indépendance de l’Azawad. Le drapeau de cet Azawad dont on ne connaît pas les contours à présent flottent sur la ville de Kidal. Ainsi, on ne manqua pas d’assister au déplacement de la crise vers le centre du Mali, sous-tendu par des luttes intercommunautaires et intra communautaires où dogons et peulhs furent mis en exergue, alors que ceux-ci ont vécu jusqu’ici en parfaite symbiose, sauf en cas de mineures incompréhensions survenant par les dégâts aux champs, les premiers étant cultivateurs et les second éleveurs. Ces incompréhensions ont toujours trouvé rapidement des solutions pacifiques. C’est pourquoi l’idée se confirme que la crise entre eux tire sa source ailleurs qu’entre peulhs et dogons et persiste malgré la paix des braves signée plusieurs fois par les belligérants. Ces crises entre ceux-ci n’ont jamais connu de telles ampleurs comme celles auxquelles on a assisté à Sobane Da, Agassagou, Boulkessi, et autres. D’ailleurs dans toute la région de Mopti et une partie de la région de Ségou, les gens ont leur cœur dans leurs mains. On y dort que d’un œil parce que des criminels trouvent le moyen d’exprimer impunément leur haine à cause de l’aigreur qu’ils nourrissent, en pensant que leur échec dans la vie incombe aux autres.
L’année reflète le deuil d’Amadou Kouffa et Iyad Ag Ghaly qui demeurent insaisissables et restent enfouis dans le bourgou et le sable du désert. Ils sont morts plusieurs fois, selon la France. Leur mort souhaitée arrangera certes la situation.
Il y a eu une autre fausse note qui constitue un scandale quand les Maliens ont été réveillés par la nouvelle d’achat d’avions de guerre à coups de plusieurs milliards mais qui ne sont en mesure de voler. Encore, une fois, l’argent du contribuable a été jeté par la fenêtre et ces mécènes courent toujours les rues.
Sur le plan politique et institutionnel :
On notera durant cette année écoulée, deux prorogations de mandat des Députés, donnant lieu à différentes interprétations de certains Maliens qui en déduisent qu’ils ne sont plus élus mais nommés par le Gouvernement ; que donc ils sont dans l’illégalité totale. C’est pourquoi ceux-ci demandent avec insistance l’organisation des élections législatives, alors que la révision de la constitution du 25 février 1992 peine à trouver le chemin chez d’autres qui n’en voient pas l’opportunité. Un bras de fer avec des opposants ne s’est pas encore baissé par rapport à cette volonté de changement.
Cependant cette révision est rendue nécessaire à la demande de la CEDEAO qui impose à tous ses Etats membres de créer une Cour des Comptes, et pour beaucoup d’autres raisons.
Tout autant, des Maliens n’ont pas compris qu’en cette période de crise aigue, le Gouvernement soit pléthore et absorbe pour sa prise en charge des ressources importantes. Ils demandent, au demeurant, la réduction de la taille de cet attelage, et mieux, de réduire le train de vie de l’Etat, de relire la charte des partis et la loi électorale, pour y intégrer entre autres des critères plus adaptés à leur création , ce qui aura pour conséquence de réduire la manne financière qu’ils absorbent, alors que certains ne se limitent qu’à une famille et ne jouent aucun rôle. Tel est le cas de certaines institutions.
Par ailleurs, on a assisté à la nomination de certains individus à des postes très importants de responsabilité, alors que si la mesure instituée par Oumar Tam Tam Ly relative à l’appel à candidature aux emplois supérieurs de l’Etat et des établissements publics avait été maintenue, ils n’auraient pas pu les occuper. Beaucoup se demandent actuellement si le mérite seul suffit à obtenir la promotion dans l’Administration.
Sur le plan de la Gouvernance :
Un Etat, s’il veut être crédible, doit se fonder sur la bonne gouvernance, d’autant qu’elle s’entend de traiter tous les citoyens au même pied d’égalité au point de vue droit, en termes de respect des libertés, en termes de gestion rationnelle des ressources, qui doivent être équitablement réparties entre tous les fils du Pays, en un mot, pour résumer, gérer les affaires conformément aux lois que nous nous sommes librement données. ; que le mérite soit récompensé à juste titre et les fauteurs, sans exception, soient mis au banc de la Justice exempte de tout reproche, indépendante et impartiale. Les gens tolèrent de moins en moins que “certains boivent du dolo et que d’autres racontent des histoires“ ; que des bras laborieux ne profitent pas de leur labeur au profit d’une minorité malhonnête ; que certains aient de la peine à se nourrir alors que d’autres sur le fruit du travail de ceux-là construisent des châteaux. Les scandales nés de la mauvaise gouvernance se passent de tout commentaire, car ils forment une chape de plomb tirant tout effort d’émergence vers le bas.
Ce n’est pas un secret que l’année 2019 a été riche en scandales de toutes natures.
SUR LE PLAN SOCIAL
L’année 2019 a été dominée aussi par des conflits sociaux, ayant trait notamment à la revalorisation des salaires, à des conditions de travail meilleures, soldés par des engagements que l’Etat a pris couteau à la gorge envers les travailleurs dont il n’a pas les moyens d’honorer ou refusent d’honorer. En tout cas la mésentente entre les protagonistes est palpable et bat des ailes. Des débrayages dans tous les secteurs d’activités n’ont pas été du tout repos. Rares les syndicats qui n’ont pas frappé à la porte du Gouvernement pour lui rappeler sa parole donnée durant l’année écoulée. Le Gouvernement ignore qu’il a la posture d’une chèvre dont la queue ne ferme pas les fesses. Tout est ouvert et s’offre en spectacle, si bien que la trêve demandée ne semble pas judicieuse pour les contestataires sociaux : les scandales financiers, le train élevé de la vie de l’Etat, la pléthore de l’attelage gouvernemental, la part belle faite aux pistoleros du nord, et des meilleurs, tout y entre pour justifier aux yeux de ces derniers la pertinence de leurs revendications. Il faut convenir aussi que ventre affamé n’a point d’oreille. Quand vous avez la bouche remplie de nourriture, celui à qui vous demandez d’observer le jeun pense que vous vous moquez de lui.
Sur le plan économie et finance :
C’est de l’euphémisme de dire que l’économie malienne est faible et est tributaire de la volonté des bailleurs de fonds et des réseaux mafieux. Cela fait croire à la plupart des Maliens que si ceux-ci se fâchent à l’heure, nous oublieront tout notre honneur pour nous mettre à genou et prier, car nous n’auront même pas nos salaires. Déficitaire devant l’Eternel depuis quelques années, le Mali compte pour réaliser tous ses programmes sur l’aide extérieure, alors qu’il possède des ressources du sous-sol et du sol, humaines énormes. Le Malien doit se réveiller et profiter de ce don céleste par le travail et l’intelligence qui dort en nous par paresse. Pour pallier ce déficit d’engouement à la production, excepté quelques secteurs, l’Etat doit impulser la dynamique à l’investissement et au financement de projets porteurs. Comment admettre que jusqu’ici il n’existe pas de banque d’investissement au Mali comme c’est le cas dans la plupart des pays voisins ? Et il n’y a pas non plus une banque islamique tandis que 95% des Maliens sont supposés être des musulmans. La réalisation d’infrastructures de transport est un luxe quand la population n’engage pas un bras de fer avec les autorités. Cette année, il a fallu une révolte des citoyens de Kayes et d’ailleurs pour que la réhabilitation de routes qui engrangent deux milliards à l’économie par jour soit pensée.
En d’autres termes, est-ce que tous les établissements financiers et autres boostent réellement l’emploi pour enrichir l’Etat et sa population, au regard des difficultés que rencontrent les pauvres à avoir un financement ? On entend souvent des gens dire qu’ils sont entrés en belligérance contre l’Etat parce qu’ils n’arrivaient pas, malgré toutes les tentatives, à mettre leurs projets à exécution, faute de financement. C’est le même regard de mésintelligence que l’on porte sur les structures publiques comme Fafpa, Apej, Anpe et autres. On se pose la question de leur utilité. D’ailleurs, elles sont presque toutes mises en veilleuses le temps que la crise passe. Enfin, l’annonce de l’ECO cette année, qui était sensée, comme monnaie, mettre un terme à l’arrimage dont le CFA faisait l’objet, à la perte importante de réserves sur lesquelles était couchée la France, ne rassure plus à cause des récentes déclarations, lors de la visite de Emmanuel Macron, Président de la République française, en Côte d’Ivoire, d’Alassane Ouattara. La jeunesse malienne doit être à l’avant-garde de cette lutte pour l’affirmation d’une monnaie propre à l’Afrique et convertible sur le plan mondial.
Pour avoir l’eau et l’électricité à satisfaction, il faut d’abord entrer en retraite pieuse. On a suffisamment de l’eau et on pleure de soif, et on a autant de soleil, mais on n’a pas de lumière dans les maisons. On ne compte pas le nombre de villes et de villages qui sont sans eaux potables, sans électricité.
Culture, jeunesse et sport :
La quasi-totalité des Maliens convient que les jeunes ont perdu les repères qui constituaient le socle de la vie en société. L’enseignement en pâtit. L’espace scolaire est voué à différentes vicissitudes tel que l’on le vivait au far-west, où politique et prostitution se côtoient, le maître jadis craint et respecté devient l’égal de l’élève.
Dans tout cela, les enfants sont inquiets de la sauce de l’avenir dans laquelle ils seront mangés. L’incertitude plane. A ce niveau, pour le bonheur de tous, l’Etat est appelé à prendre toutes ses responsabilités afin que la jeunesse trouve ou retrouve le sourire des années 64, 65.
Enfin, le constat actuel s’exprime dans l’indifférence de l’âge jeune aux recherches relatives à nos traditions, à nos valeurs ancestrales au profit des réalités qui ne sont pas les nôtres. Il est souhaitable que ceux qui consacrent leur temps et leur énergie pour la valorisation de nos us et coutumes soient encouragés et soutenus. C’est pourquoi il est incompréhensible que les livres qui parlent de notre histoire ne soient pas lus, ainsi laissant des connaissances dormir et décourageant l’esprit de recherche sans laquelle aucun progrès n’est possible. Tout autant, nos artistes ont besoin de notre accompagnement s’ils apportent une valeur ajoutée à notre existence en tirant leurs sources d’inspiration du terroir. C’est dire que nous étions riches de notre culture avant l’arrivée des colons arabes et occidentaux. Berceau de l’humanité, l’Afrique a donné souffle à plusieurs civilisations, et elle est en mesure de pouvoir trouver une adéquation entre notre histoire avec les innovations technologiques. Donc la jeunesse actuellement vivante a le devoir, voire l’obligation, de réintégrer la destinée de celle-ci dans son existence réelle et la sortir du joug d’asservi politique, économique, financier qui ne profite qu’à autrui.
Sinon, à part ces quelques écueils, le Président de la République l’a dit, la résilience du Malien devant l’adversité est admirable. Donc, malgré la contexture qui est celle du Pays aujourd’hui, le taux de croissance demeure à 5%, et la production céréalière a sensiblement augmenté, et beaucoup a été fait ou entrepris pour la satisfaction de la demande sociale.
C’est vrai, la gouvernance publique s’améliore, et la Justice se remet de mieux en mieux, et autant pour l’armée dont la remise à niveau demande le sacrifice de tous les Maliens.
Quel bonheur que celui de l’organisation du Dialogue National Inclusif qui s’est tenu à Bamako, durant lequel toutes les sensibilités que renferme la Nation malienne se sont retrouvées, se sont parlées et se sont, en grande partie, comprises ! Ainsi, le groupe armé, la CMA, s’y est inscrit dans la logique de l’intégrité du territoire.
Que l’année vers laquelle les regards avertis sont dorénavant tournés nous apportent la solution à tous nos problèmes ! Que la paix et la prospérité reviennent ! Que les cœurs des Maliens se forment en un seul ! Bonne année 2020 !