LA FORCE DES LOIS DE LA REPUBLIQUE

Pour ne pas choquer les différents concepts traitant de la forme républicaine d’un Etat, la définition  donnée par  Vikipédia  semble être plus près de l’exactitude. Selon ce site d’abreuvoir de données dans tous les domaines, « la République désigne un mode de gouvernement dans lequel le pouvoir est exercé par des personnes élues. Une République est typiquement antonyme d’une monarchie héréditaire, mais n’est pas toujours synonyme de démocratie.

La République est en 2020 la forme de régime politique la plus répandue : sur 197 pays, 151 sont des républiques ».

En toute évidence, d’après cette définition liminaire de la république, le pouvoir s’acquiert par les élections, et pas autrement. Les élections ne se font pas ex-nihilo. Elles se fondent sur des textes dont la constitution est le plus fondamental, étant la matrice qui donne naissance à toutes les lois régissant cette république.  Ainsi, toute loi qui ne lui est pas conforme est anticonstitutionnelle. La constitution, elle-même, est une émanation de la volonté du peuple, qui décide, dans un Etat souverain, des règles qui répondent mieux à ses aspirations. C’est elle qui définit les institutions, la désignation de leurs membres, le mode de leur exercice et la durée de leur vie.

Ainsi, en référence à la dernière constitution du mali, du 25 février 1992, survenue à la clôture des évènements de mars 1991, dont le Président de la République s’engage à faire respecter (art.37 de la constitution) et dont il en est le gardien(art.29 de la même constitution), le Mali est une république dont le Premier Responsable doit être élu démocratiquement. Pour cette élection comme celle des autres fonctions électives, les lois strictement peaufinées permettent aux citoyens, si elles ne sont pas biaisées par ceux qui défendent leurs intérêts propres, de désigner de façon éclairée leurs dirigeants.

Malheureusement, pour des raisons liées à de multiples facteurs ou paramètres, ceux qui ont eu en charge de leur organisation et proclamation n’ont pas été toujours dignes de la confiance du peuple, créant, comme ce fut le cas récemment, des frustrations, des mécontentements, qui se résument en une injustice, ajoutant du coup, par revers de la médaille, à d’autres insatisfactions,  dont les conséquences ont conduit à l’idée de l’illégitimité du pouvoir.

Comme toujours, dans pareils cas, la dégénérescence du contrat  de conformisme qui lie le peuple à ses dirigeants peut être attisée. Ainsi, virent le jour des regroupements, tels que la CMAS, le FSD, l’EMK  et autres, qui demandent la démission du Président du pouvoir, puisqu’aucun déni ne vient contester la véracité de la mauvaise gouvernance actuelle, et en conséquence, du mécontentement qui s’accumule au fil du temps.

Mais, cependant, aucune disposition de la constitution ne prévoit une possibilité légale de démission forcée du pouvoir du Président par une partie de la population, même si elle a tendance à gagner une adhésion importante.

En effet, on ne fera pas fi que beaucoup de Maliens, qui sont en déphasage avec les contestateurs, adoube le Président et demeurent dans la logique de le soutenir jusqu’au terme de son deuxième mandat. Ce qui est vrai que ce dernier ne s’est pas imposé de lui-même aux Maliens. Il a été élu, jusqu’à preuve de contraire. Et s’il a obtenu le pouvoir par des voies détournées des lois, c’est aux organes chargés de veiller à la sincérité des scrutins qu’il faut s’en prendre, qui n’ont certes pas jouer leur rôle tel que souhaité par tous. La culture de l’honnêteté leur a manqué comme à beaucoup d’autres responsables qui ne jouent la musique que pour leurs oreilles.

Selon notre arsenal juridique, le Président de la République n’est pas responsable de l’action gouvernementale qui incombe aux Premier Ministre et Ministres. Si c’était le cas, l’on pouvait engager contre lui une motion de censure.

Au demeurant, le droit à la manifestation est protégé par l’article 5 de la constitution, et même d’association et de cortège, car aucun pouvoir ne peut gagner l’unanimité. L’histoire nous enseigne, dans ce cas, qu’aucune manifestation ordinaire et règlementée ne peut conduire au renversement d’un pouvoir si ce n’est par un coup d’Etat de l’armée. Par rapport à cela, l’article 121 ne peut être plus clair : « Le fondement de tout pouvoir en République du Mali réside dans la constitution.

La forme républicaine de l’Etat ne peut être remise en cause. Le peuple a droit à la désobéissance  civile pour la préservation de la forme républicaine de l’Etat.

Tout coup d’Etat ou putsch est un crime imprescriptible contre le peuple malien ».

C’est pourquoi, quand une manifestation dépasse le cadre de la légalité, les services compétents pour la répression se mettent en branle. La stabilité du pays le commande. Imaginez une nation dans laquelle, à chaque fois qu’une partie de la population n’est pas contente, il faut renverser le pouvoir, parce que ceux qui viendront par ces moyens ne sont pas toujours assurés de la caution de tous. Ce serait alors l’éternel recommencement auquel un Etat crédible ne peut se soumettre. Cela fait qu’il n’y a pas mieux que les urnes pour l’alternance politique. C’est dire, enfin, que la mentalité malienne doit redevenir plus honnête pour pouvoir combattre un pouvoir corrodé. Qu’es-ce qui coûte à chaque responsable ou citoyen, à son niveau, de refuser d’exécuter l’ordre du pouvoir lorsqu’il est illégal. La baïonnette intelligente sied en ce moment. Quand le Chef est honnête, il redresse les malhonnêtes de son peuple, et quand il est malhonnête, il incombe aux citoyens de le redresser en ne le suivant pas dans ses errements.

Tout autant il est difficile d’admettre que le Président dissolve l’Assemblée Nationale en vertu de l’article 42 de la constitution qui n’a pas encore fini de s’installer sans revoir toute la chaîne qui a conduit à la situation de révolte de certains Maliens.

La Cour Constitutionnelle est une haute juridiction qui est souveraine dans ses décisions, et n’est pas exempte d’erreurs d’appréciation comme toute autre juridiction. Il faut rapidement revoir les textes qui la régissent quant au mode de désignation de ses membres,  à sa composition et son fonctionnement pour éviter de tomber dans des travers s’il y en a eus.

On regrettera que dans le domaine judiciaire, le Président de la République a la main haute. Il est le président du Conseil Supérieur de la Magistrature qui décide du sort des Magistrats, comme détenant la majorité à l’Assemblée Nationale, il se retrouve avec six sages à la Cour Constitutionnelle par la désignation de ses membres actuellement. Les membres de la Cour Suprême sont également nommés par lui.

Mais tout cela, il est souhaitable que les acteurs de ces hautes fonctions acceptent qu’ils demeurent là pour toute une nation mais pas pour un homme, et qu’ils prennent leurs décisions sous la seule autorité de la loi et de l’intérêt du peuple.

Je me résume, en disant qu’en cas de dissolution de l’Assemblée Nationale, le Président de la République ne peut pas mettre en œuvre des pouvoirs exceptionnels en violation des dispositions de l’article 50 de la constitution qui détermine dans quel cas les mesures exceptionnelles sont prises, sur consultation du Premier Ministre, des Présidents de l’Assemblée Nationale  et du Haut Conseil des collectivités ainsi que de la Cour Constitutionnelle. Il pourra, en l’occurrence, organiser des élections générales vingt et un jours au moins et quarante jours au plus après la dissolution.

Est-ce cela peut être le cas avec la Cour Constitutionnelle qui … «  comprend neuf membres qui portent le titre de Conseillers avec un mandat de sept ans renouvelable une seule fois ». Il n’est prescrit nulle part dans les dispositions constitutionnelles la mise à fin de service avant terme de cette Cour, sauf que l’article 92 de cette constitution dispose : « Qu’en cas de décès ou de démission d’un membre, le nouveau  membre nommé par l’autorité de nomination concernée achève le mandat commencé ». Cela veut dire que si feu Modibo Tounty Guindo avait été nommé par le Conseil Supérieur de la Magistrature, c’est ce même Conseil qui doit nommer son remplaçant.

Il n’est superfétatoire d’affirmer que le respect des lois de la République est un gage de bon fonctionnement de l’Etat, qui gagne ainsi en stabilité.

 

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